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Les titres fonciers au secours du bassin du Congo : l’histoire du film « The Corridor »

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Le documentaire « The Corridor » suit Dominique Bikaba dans sa mission pour obtenir des titres fonciers pour les communautés autochtones, une démarche qui redéfinit la préservation des terres ancestrales et de la forêt tropicale dans le précieux bassin du Congo.

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Dominique Bikaba connaît l’une des plus importantes forêts du monde comme sa poche. 

« Je suis né dans la forêt. Je peux survivre dans la forêt pendant deux mois sans eau ni nourriture parce que je sais qu’il y a tout ce qu’il faut », explique M. Bikaba, originaire de l’est de la République démocratique du Congo (RDC).

Membre de la tribu des Bashi, M. Bikaba vivait à la lisière de la forêt, aujourd’hui connue sous le nom de parc national de Kahuzi-Biega. Sa famille et d’innombrables autres Batwa – les pygmées – ont été expulsés de leurs terres ancestrales dans les années 1970 lorsque le gouvernement congolais et les organisations de protection de la nature occidentales ont entrepris de protéger la forêt, qui s’étend sur plus de 600 000 hectares.

«Que reste-t-il à une communauté qui a perdu sa langue, sa terre, sa culture?» demande M. Bikaba. Son histoire est relatée dans le nouveau film d’Age of Union, intitulé «The Corridor», qui explore la quête du peuple Bashi pour récupérer ses terres ancestrales après des décennies de tensions avec les groupes de conservation qui l’ont expulsé de leurs terres.

L’expulsion des populations autochtones de leurs terres ancestrales

Le parc national de Kahuzi-Biega chevauche le bassin du Congo, qui se situe principalement en RDC et s’étend sur six pays d’Afrique centrale. Kahuzi-Biega est la deuxième plus grande forêt tropicale de la planète après l’Amazonie et représente plus d’un quart de la forêt tropicale restante dans le monde. 

La protection de la faune variée, de la biodiversité et des grands singes du parc revêt un intérêt certain pour les groupes de conservation, mais selon M. Bikaba, leurs méthodes sont peu sensibles au rôle joué par les communautés autochtones dans la protection de la forêt depuis des siècles.

« L’idéologie occidentale de la conservation perçoit les communautés comme des ennemis de la nature, explique Bikaba dans le film. Nos croyances [en tant que Batwa] estime que les humains, les communautés locales et les peuples autochtones font partie de la nature, au même titre que les gorilles, les éléphants et les forêts. Voilà ce qu’est la conservation pour nous. »

Pour les Batwa, premiers habitants de la RDC, la forêt est au cœur de leur vie et de leurs moyens de subsistance; elle est le lieu où ils pratiquent leurs traditions et leur culte et fournit des ressources essentielles à leur survie. Depuis qu’ils ne peuvent plus vivre dans la forêt, leur vie a complètement changé et la pauvreté s’est généralisée.

«Le pouvoir que nous avons découle de cette forêt. Si les populations autochtones perdent celle-ci, elles perdent leur culture, elles perdent leur pouvoir, elles perdent leur identité», estime M. Bikaba.

Dominique Bikaba, fondateur de Strong Roots Congo.

Une solution potentielle : Les titres fonciers

En 2014, la RDC a adopté une mesure législative permettant aux communautés d’obtenir des titres fonciers sur leurs terres ancestrales. En obtenant des titres fonciers, les communautés peuvent ainsi prouver leur propriété, vivre librement sur ces terres et continuer à protéger la forêt de l’intérieur pour les générations futures.

 

Présenté au Festival international du film de Toronto en septembre 2023, The Corridor suit le parcours de Dominique Bikaba, fondateur de Strong Roots Congo, et de Kerry Bowman, fondateur de la Forest Health Alliance, alors qu’ils s’efforcent d’obtenir des titres fonciers pour 21 communautés. Si les deux hommes gagnent leur pari, ces titres créeront l’un des premiers corridors de faune sauvage gérés par les communautés locales au monde.

«On prend de plus en plus conscience que les populations autochtones et traditionnelles du monde entier sont celles qui savent le mieux comment guérir leurs forêts», résume M. Bowman.

La projection du film « The Corridor » à Toronto, le 6 septembre 2023.

Le film de 32 minutes documente le processus participatif de cartographie au cours duquel les membres de chaque communauté assistent à une réunion pour dessiner les limites forestières des zones qu’ils revendiquent en propre. Les chefferies et le personnel de Strong Roots Congo se rendent ensuite dans les forêts pour prendre les coordonnées des limites à soumettre dans leur demande de titre foncier. En 2022, après huit ans de travail avec les communautés locales, les demandes de titres fonciers pour le corridor ont été soumises au gouvernement congolais. Le film fait le bilan de ces demandes.

Des efforts communs pour la protection de la biodiversité et des droits fonciers

« Une nouvelle façon d’aborder la conservation consiste à positionner les communautés et les personnes au centre de la solution plutôt que de les isoler, » précise Dax Dasilva, fondateur d’Age of Union.

Dax Dasilva, fondateur d’Age of Union, lors de la première du film "The Corridor" à Toronto, le 6 septembre 2023.

Depuis 2020, Age of Union œuvre avec la Forest Health Alliance et Strong Roots Congo afin de protéger les grands singes du pays et de créer une connectivité des habitats forestiers pour les espèces menacées en construisant et en conservant un corridor faunique qui agit également comme un bouclier climatique.

Chaque année, le bassin du Congo stocke 1,2 milliard de tonnes de carbone, ce qui contribue à ralentir le changement climatique mondial en absorbant les gaz à effet de serre.

« Nous ne sommes plus à l’époque où l’on essayait de sensibiliser les gens. Nous sommes dans une décennie d’action, conclut M. Dasilva. La lutte contre les changements climatiques commence ici. » 

Crédits

Cover & Photos 1, 2, 3: Marc Lamy

Photos 4 & 5: George Pimentel

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